Retrouvez le récit des membres du projet Sénégal qui se sont rendu sur place au début de l’année pour concrétiser le projet :
« Aujourd’hui, planning serré : réveil 7h, petit-déjeuner 8h, visite de l’école 9h, le collège 10h, le forage 11h, les femmes faisant du maraîchage 12h, repas 13h, petite sieste puis visite d’un village en fin d’après-midi. Heureusement, le planning est sénégalais et ici le temps est extensible comme nous le rappelle Matar. Nous nous lèverons donc certes à 7h, mais ne déjeunerons qu’aux environs de 9h – ce qui nous laissera le temps de monter les maquettes de pompes – pour une arrivée à l’école autour de 11h. Malheureusement, le soleil n’est pas au rendez-vous, nous avons donc laissé les maquettes à la maison et passerons à l’école jeudi pour faire nos démonstrations. Pour le moment, nous rencontrons le très sympathique directeur de l’école qui nous propose de visiter les douze classes allant du « CP » au « CM2 » soit d’environ 6 à 14 ans.
Chaque visite se déroule de manière similaire : le directeur rentre dans la salle, les élèves se lèvent, le directeur les fait s’asseoir, nous présente, puis nous laisse parler de notre projet, si muant soit-il. L’un d’entre nous prend la parole, parle du projet de boulangerie de M.Ba, de notre envie de les inclure là-dedans, puis nous sortons après les avoir saluer. Une fois devant la porte, on entend le professeur demander à la classe : « Vous avez-compris ? » et les élèves à l’unisson « Nooooooon ! », ce qui a l’air de bien amuser tout le monde, surtout nous.
Plus on avance, plus les enfants sont jeunes, moins ils comprennent mais plus ils sont heureux de nous voir et finissent presque par nous sauter dessus, au point de nous empêcher de rentrer dans la dernière salle ! Nous quittons l’école encerclés d’une horde de plusieurs dizaines si ce n’est centaines d’enfants, souvenir impérissable.
Prochaine étape, le collègue – ou « CEM » – à quelques mètres de l’école. Il est trop tard pour rencontrer des élèves, nous nous contenterons de discuter avec le directeur et l’équipe de professeurs pour qu’il nous parle des besoins du CEM. Ceux-ci sont multiples et variés : manuels, matériel informatique, verrerie pour les TPs de chimie… Bref nous notons tout ça en espérant pouvoir récolter le maximum en France et partons essayer de réparer leur photocopieuse qui est HS depuis quelques jours, pourtant nécessaire pour le bon fonctionnement du CEM ; en vain !
Tant pis, nous nous occuperons de cela jeudi aussi, direction les cultures maraîchères des femmes du village. Impressionnant de réussir à faire pousser tant de choses dans un sol si aride et sous un soleil si puissant. Les femmes d’ici n’ont lancé les cultures que depuis deux ans, n’exploitant qu’une petite fraction de leur hectare disponible et arrive déjà à obtenir des aubergines, oignons, navets ou encore de la salade. Elles nous montrent même quelques pieds de tomates ! Nous nous installons ensuite à l’ombre d’un arbre pour que les femmes nous fassent part de leurs difficultés. Ici encore, elles sont nombreuses : manque de matériel – râteaux, pelles, fourches, arrosoirs, gants, bottes, masques…–, de pesticides et surtout de formation – point sur lequel elles insistent particulièrement. Elles nous parlent aussi des problèmes de semences, très difficiles à obtenir ici, et du prix exorbitant de l’eau qui leur empêcherait d’être rentable si la mairie ne les appuyait pas financièrement. Enfin, nous abordons le problème du plastique qui est tellement partout ici qu’il se retrouve dans leur culture et contre lequel elles ne peuvent rien faire d’autre que de balayer régulièrement… Apparemment, le gouvernement sénégalais est en train de mettre en place un projet de rachat des déchets plastiques, mais celui-ci n’est pas encore arrivé jusqu’à Boulal, affaire à suivre donc !
Nous enchaînons avec la visite du forage qui lui aussi nous réserve quelques surprises. De grandes flaques s’étendent tout le long des jonctions entre le forage, les deux châteaux d’eau et la citerne. Nous identifions rapidement leur origine : toutes les vannes n’ont pas été changées depuis la mise en place de l’installation en 1951, et présentent donc de nombreuses fuites. C’est ainsi que plusieurs m³ d’eau se perdent chaque jour dans la nature, à la fois via les fuites, mais aussi dû au trop plein qui s’est mis naturellement en place lorsque les vannes ont cessé d’être mobiles. L’installation serait donc à renouveler fortement si l’on envisage de prolonger le réseau d’eau.
Nous faisons ensuite un petit détour par l’unité de pasteurisation du lait, où nous ne voyons qu’un congélateur de stockage pour le lait – mais là aussi PRAPS doit faire des miracles. Le soleil est ressorti, le classique coup de bambou de 15h se fait sentir, nous rentrons nous délecter d’un plat local – poisson fumé accompagné du riz au haricot – préparé par les deux jeunes cuisinières de la maison : Mboyo et Aïssa. Le matin nous avions eu le point de vue des femmes agées, c’est au tour des jeunes – respectivement 17 et 18 ans – de nous partager leur vision, et justement, elles en manquent : ni projets, ni avenir, ni mêmes opportunités. Elles rêvent de luxe à la française, et peinent à saisir le gouffre entre l’image vendue par le cinéma et la réalité de vie d’émigré en France. Nous essayons de trouver les mots mais c’est loin d’être évident et finissons tragiquement par partager un peu leur désespoir…
Nous prenons ensuite une charrette pour nous rendre à un village situé à trois kilomètres à l’ouest de Boulal. Le pauvre canasson, nous montons à huit à l’arrière, il semble assez rapidement à bout de souffle… L’expérience n’en reste pas moins incroyable, le paysage magnifique défile, avec à l’infini une monotonie correspondant à l’Afrique de l’imaginaire collectif.
Nous arrivons dans un petit village, quatre ou cinq maisons encerclées d’une barrière pour éviter que le bétail ne rentre – ou sorte selon l’heure. La majorité est en paille, certaines sont partiellement recouvertes de bâches plastiques. Nous sommes accueillis par les anciens qui nous invitent à venir nous installer sur une natte. Assez rapidement, notre présence provoque un rassemblement très hiérarchisé : les anciens d’un côté, les femmes d’un autre et les hommes au loin faisant semblant de s’occuper, à l’exception de Demba Ka, présent parmi les femmes, qui sera le porte parole du village pour nous exposer ses problèmes. Il insistera sur trois points : l’eau est loin – trois kilomètres –, le lait ne se garde pas, et les enfants ne peuvent pas aller à l’école. Nous assumons directement notre incompétence sur ce dernier point. Nous discutons partiellement de l’époque où le centre de refroidissement fonctionnait encore, mais ils n’ont pas vraiment l’air de faire le lien avec leur problème. Tant pis, nous poursuivons la discussion jusqu’à la tombée de la nuit, faisons une petite séance photo et reprenons la charrette. A notre arrivée à la maison, un couscous nous attends, Awa nous prépare le thé, nous profitons de la soirée avant de rejoindre nos lits.
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